lundi 25 août 2014

L'esthétique du vieillissement : la tôle d'acier (4)

   Aujourd'hui,  pour finir la série : une patine gastronomique, la poêle à frire en tôle d'acier.


poêle en tôle d'acier 

   A l'achat, la poêle est d'un gris métal brillant. Lors du premier usage, il faut culotter la tôle, la faire chauffer doucement avec un peu d'huile. A force de répéter l'opération, la tôle noircit et se graisse uniformément. Là, on obtient un revêtement anti-adhésif de toute beauté, solide et efficace.
Les poêles en acier sont idéales pour saisir : œuf au plat, lard grillé, sardine...
On préchauffe doucement la poêle, avec un peu de matière grasse si l'aliment est maigre. (lorsque la poêle est bien patinée, inutile !). Lorsque la chaleur est répartie uniformément, augmenter le feu à la puissance voulue. Attention aux risques de brûlures en prenant le manche. 
    On peut aussi se servir de la poêle pour faire cuire des crêpes, ou fondre un magret de canard côté peau. Mais surtout pas de sauce tomate, pas de déglaçage au vinaigre, ni de petits légumes mijotés doucement ! L'acidité attaque le culottage, et tout le long travail est à recommencer ! (Noter que ce n'est pas irrémédiable).

Finition : manche riveté

Entretien

   Dès la fin de cuisson, passer la poêle sous l'eau chaude, au besoin gratter les parties attachées à la paille d'acier. Surtout pas de détergent ! C'est le précieux culottage qui va partir. On essuie soigneusement. Si la surface est trop sèche, huiler légèrement. Attention, ce n'est pas sale ! Le culottage n'est pas du gras brûlé, mais bien une couche intégrée à la matière.
Au bout de plusieurs années, l'eau et l'égouttage suffisent, le culottage empêche la tôle de rouiller.

   Si vous trouvez quelques tâches de rouilles au début, gratter simplement. La rouille n'est pas nocive.



Bonne semaine, Bm

lundi 18 août 2014

L'esthétique du vieillissement : le cuivre (3)


Plaque de cuivre, celle du dessus : finition martelé

Vert-de-gris : oxydation de surface. Le vert-de-gris forme une couche de protection contre la corrosion de masse
Lustrage au tour à polir

Avant / après polissage. On voit que sous la couche d'oxydation, le cuivre est intact, brillant et d'une couleur intense.










Bonne semaine, Bm

lundi 11 août 2014

L'esthétique du viellissement : le cuir (3)

Suite de la série sur les patines

Le cuir

 

Chute de cuir non teinté : à droite, bande de cuir récent, à gauche, patiné depuis quelques années

La patine naturelle


A l'atelier, j'utilise de la bande de cuir naturel, non teinté pour faire les poignées des sacs.
Le cuir est d'un beige doux. Au fil du temps le cuir fonce jusqu'à un brun clair et chaud. C'est un cuir qui reste beau, il évolue, mais ne vieillit pas. Pas de problème de teinture qui se fane. Par contre encore jeune, c'est un cuir salissant, il marque très vite les tâches, et demande d'être méticuleux. (ici c'est une guerre permanente contre les chiures de mouches !)


De manière générale, le cuir fonce, et s'assouplit s'il est bien entretenu. (Les plis d'aisance sur les chaussures).
La patine du cuir est très appréciée, on trouve la plupart des articles en version cuir vieilli (fauve, avec une marbrure plus claire) parfois de belle qualité.
Mais vous obtiendrez la meilleure des patines en utilisant régulièrement votre cuir, chaussures ou blouson.


L'entretien

Le cuir est une matière vivante, c'est une peau qui est tannée pour garantir sa conservation. Laissé sans soin, le cuir se décompose. L'entretien vise donc à recréer artificiellement les caractéristiques de la peau : la peau respire, la peau est nourrie, la peau est protégée.

Les étapes

- brosser régulièrement les articles en cuir pour enlever la poussière.
- nettoyer soit à l'aide d'une crème spéciale, soit avec une éponge propre légèrement humide + un peu de savon noir.
- cirer à la chamoisine (bien tendue sur le doigt, pas de pli) avec un cirage de bonne qualité (type saphir, ou grison). Le cuir gras et  le fil poissé de la couture (disons entre l'enveloppe de la chaussure et la semelle) se graissent.
- lustrer à la brosse (pas la même qui sert à décrotter ! prendre une brosse plus douce, à réserver à cette usage).

Si le cuir est mouillé, le faire sécher dans un endroit aéré. Pas de chaleur excessive qui dessécherait le cuir.

 

La patine artificielle

La glaçure est un autre procédé d'entretien. On lustre le cuir de manière répétée avec un peu de cirage + goutte d'eau jusqu'à la formation d'une couche à l'aspect de vernis. Le glaçage est utilisé sur l'avant des chaussures réalisées en cuir fin et permet de protéger efficacement le cuir.
Cette technique est aujourd'hui amplifiée pour donner un aspect de patine assez extraordinaire dans le domaine de la chaussure classique homme.
On trouve des modèles du plus sage, imitant un lustre et une estompe de la teinture (une certaine sublimation des traces de l'usure), aux modèles les plus fous avec des dégradés de deux tons, une exubérance des coloris, un aspect très "laqué".
Certaines maisons se spécialisent même dans la réalisation sur mesure de ces patines.
Le courant fait des ravages sur internet, on parle même de calcéophile (!).
La patine sur une chaussure, est-ce encore classique ? Est-ce encore de bon goût ? Est-ce un chef d’œuvre ?
Va-t-on bientôt voir des variantes dans la maroquinerie ou les vêtements?




La semaine prochaine : la patine du cuivre.
Bonne semaine, bm

lundi 4 août 2014

L'esthétique du vieillissement : 2, le bois

Suite de la série sur la patine.

Le bois


Le bois est une matière organique végétale, produit par la lignification progressive des cellules, et joue le rôle de tissu de soutien (= notre squelette). 
 
Vieux chêne avec tranche poncée. On voit l'aubier vermoulu, et les veines bien dessinées.

Dégradation

Les ouvrages en bois sont sensibles aux attaques des champignons et des insectes qui se nourrissent de la lignine. Dans ces conditions, le bois se décompose peu à peu en humus.


Patine

Les éléments de menuiserie exposés au soleil et à la pluie grisent naturellement, et cela sans nuire à la solidité. (voir les belles églises scandinaves, construites en bois au Moyen Age).
La patine varie subtilement d'une essence à l'autre.
Il peut aussi apparaitre des fissures, fentes, déformations des ouvrages, le bois "travaille".

Protection

La protection des constructions a fortement évoluée aux cours des siècles, non seulement grâce aux progrès techniques, mais aussi en suivant l'esthétique de l'époque. (C'est un avis personnel). On cherche aujourd'hui à mettre en avant l'aspect "bois", "naturel", "chaud", par exemple en utilisant des peintures aux teintes dites "ton chêne", ou les fameux "anti UV". Alors qu' historiquement, les finitions des bois étaient parfois très colorés. .

Petit tour d'horizon des méthodes de protection du bois :

- dès l’abatage : coupe en période de repos végétatif,  choix des essences résistantes riches en tanins, (chêne, acacia, châtaigner, bois exotiques), sens des fibres, long séchage. A noter, on peut estimer que les pièces  vermoulues uniquement sur l'aubier (la partie tendre du bois) ont un temps de séchage de 5 ans environ. (C'est donc bon signe !)

- à la construction : choix des assemblages, pose des bois à la verticale, débord de toitures important, base surélevée, rejet de l'aubier, finitions (un simple ponçage diminue l'infiltration de l'eau dans les pores).

- traitement thermique :  la rétification (séchage à haute température) augmente la durée mais diminue la résistance.
L'autoclave en bain d'huile semble plus performant ; à température moins forte, les pores sont saturés d'huile. Le bois est ainsi hydrophobe et vieillit moins vite. (Un peu comme une bonne crème hydratante (c'est-à-dire grasse) protège du froid et limite l'apparition des rides).

-traitement chimique : peintures métalliques (les célèbres peintures au plomb, très efficaces et toxiques), peintures, lasures, insecticides et vernis de la chimie organique (pétrole).

-traitement naturel temporaire : application répétée d'huile de lin, térébenthine, cire...

-traitement naturel plus solide : peintures à l'ocre ( le rouge sang de bœuf !) ou goudron végétal.
Ces traitements, bien que très efficaces, sont peu utilisés aujourd'hui car ils changent l'aspect du bois.


Un coup de neuf 

- Application d'un dégriseur chimique ;
- Ponçage des couches oxydées.



L'architecture contemporaine utilise le grisaillement du bois comme une couleur à part entière : bardage des façades, éléments de clôture...
Par contre le bois est de plus en plus remplacé par du plastique dans l'architecture domestique : clôture, garde-corps, fenêtre, volet... 
Si encore le PVC avait la générosité d'être jaune lumineux, rouge chaud ou bleu profond, non, le PVC le plus original est "ton bois". Mais le bois est séduisant aussi pour : le craquement des planches, l'odeur du bois mouillé, la beauté des veines, l'irrégularité des nœuds, l'épaisseur de la matière, les ombres portées... La corvée de l'entretien est-elle donc vraiment un calvaire ? Les fissures, les trous, le ternissement sont aujourd'hui des défauts. Il faut que le bois fasse "neuf".

Nous admirons tant les chalets suisses, les temples japonais, les cabanes rustiques, les meubles art déco, et nous nous contentons d'ersatz bien pauvres.





La semaine prochaine : le cuir.